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1708-1709 : le "Grand Hyver"
Depuis 8 à 10000 ans nous nous trouvons dans une période interglaciaire relativement chaude et humide. Dans cette grand période existent des variations climatiques, ainsi entre 1550 et 1870 nous avons vécu un "petit âge glaciaire", avec des hivers très rigoureux. Durant les mois de janvier 1693 et 1695, par exemple, le curé du Grand Pressigny (St Martin d'Etableau) a noté en regard de plusieurs actes de sépulture "enterré dans la galerie à cause du grand froid" (qui avait gelé la terre trop en profondeur probablement). L'hiver le plus marquant par sa rigueur fut celui de 1708-1709, dont le souvenir a laissé beaucoup de traces écrites, retrouvées par exemple dans les registres paroissiaux de l'époque.
Le Grand Pressigny (St Gervais)
"L'année 1709 a esté une des plus malheureuses qui ait jamais esté, son malheur commença la vigile des roys par une gelée qui dura jusques au vingt cinq de janvier, elle gatta toutes les légumes, fit jetter les fonds de beaucoup de tonneaux, gela universellement les noyers, presques tous les pommiers, poiriers, beaucoup de chesnes, la moitié des vignes, tous les oliviers et tous les froments, détruit presque toutes les perdrix rouges, tua une infinité d'oiseaux, a presque fait mourir tous les autres arbres, et ce qui estoit resté de bled froment fut gasté à la fleur par un brouillard universel avec les vignes de soie qu'il ne s'est pas fait en ce pays icy une seule goutte de vin . Le bled a valu jusques à quatre livres et vaut encore un sur aultre (?). Cela les rivières de Loyre, du Chair, de l'Inde, de Creuse et de Vienne ont débordé de quatre pieds sur les prés deux fois dans l'année, tout le monde est réduit à manger du pain d'orge et boire de l'eau. Le vin vaut cent cinquante livres la pipe et il n'est d'aucun fruit."
Mouzay
"L'hiver de l'année 1709 fut si violent que tous les gros bleds gelèrent, ce qui cauza une grande misère, le bled n'ayant quasi point de prix et si on n'eut point semé les orges dans les gueres(?) où les gros bleds avaient gelé, tout le monde serait mort de faim. Les vignes et les autres arbres fruitiers gelèrent d'une telle manière qu'on ne cueillit cette année-là point de noix du tout et très peu de fruits. Les noyers furent entièrement gelez et perdus d'une telle manière que les hommes de ce lieu ont été privés de manger des noix toute leur vie. Dieu nous préserve à l'avenir d'un si funeste accident. Le froment a vallu quarante cinq francs la pochée, l'orge quarante, cinquante et un le boisseau. Jaille, curé de Mouzay, janvier 1711."
Sainte Radegonde
"L'année 1709, le 6 de janvier commença une gelée si violente qu'on n'en avait jamais vu de pareille, les arbres et les rochers s'en fendirent, la plupart des arbres fruitiers, entre autre les noyers, les châtaigniers, les vignes pour la plupart en sont morts. Elle ne dura, par bonheur, que dix-sept jours et elle fut succédée d'un temps doux et même chaud. Mais, huit ou dix jours après vint une autre gelée, qui, ayant trouvé les terres détrempées et les bleds tendres dessola entièrement les moissons de sorte qu'il n'est resté aucun bled sur la terre... Le blé vieil est monté à un prix excessif et, sans les bons ordres que la Cour, les Parlements et les Officiers y apportèrent, il n'y aurait point eu de prix ce qui ne procéda que de l'avarice des marchands et autres qui ne voulaient point exposer leur bleds en vente... Il faudra qu'une partie du monde entre ces deux rivières (la Loire et le Cher) périsse si Dieu dans sa bonté n'en a pitié."
Tours
"Le 14 janvier 1709 il tomba plus d'un pied de neige, qui n'empêcha pas les bleds de geler, parce que le vent la dispersa. Les arbres fendoient. Le pain estoit à peine sorti du four qu'il geloit, et le vin geloit visiblement en le versant dans le verre. On ne buvait qu'à la glace. On ne pouvait s'échauffer qu'avec le meilleur feu. On ne pouvait dans les rues distinguer les vieux et les jeunes parce qu'on avait pareillement la barbe et les cheveux blancs. Enfin ce froid saisissoit le coeur et on se trouvait mal." "Ce froid qui surpassa celui de 1608 était au-delà de ce qui doit comporter la zone tempérée de la France." (Note ajoutée en 1893)
Loches
"Il est à remarquer que c'est cette année que nous avons étés punis de Dieu et qu'il nous a fait sentir la pesanteur de son bras en nous envoyant une année chère causée par la rigueur de l'hiver qui a été si grande que le bled a valu jusq'à cent sols le boisseau et le vin cinquante cens la pipe." (Note écrite à la fin du registre de 1709)
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